« Le Mois de Ramadan » par Noumane Rahouti

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« La position prise dans le texte est celle de son auteur et pas forcément celle du site qui l’accueille et la publie »

Il y a dans les rituels des secrets qui se découvrent et se redécouvrent. Il y a dans la répétition des pratiques religieuses quelque chose de cyclique et, pourtant, quelque chose de différent. Le mois de Ramadan, plus qu’un rituel, est un mois de réconciliation, un mois de réconciliation avec la nature, réconciliation avec l’autre, réconciliation avec soi. C’est dans cette perpétuelle réconciliation que l’être revient à lui, qu’il revient à Dieu, qu’il renaît et redécouvre son origine d’être humain, cette essence qui est bonne et dépourvue de divisions. Se réconcilier, c’est effacer les divisions, aussi bien externes qu’internes. Se réconcilier, c’est faire la paix.

L’âme, le corps et l’esprit

Pendant ce mois, les efforts du corps et de l’esprit servent l’illumination du cœur. C’est en se détachant de ce qu’il devient que l’être se rapproche de ce qu’il est, de son unité originelle. Cette quête purificatrice requiert un travail, un travail de l’intérieur et de l’extérieur. Comme nous le disons souvent, il ne s’agit pas seulement de jeûner avec sa bouche mais avec son être et son esprit. L’affaiblissement physique et la discipline psychologique permettent l’élévation spirituelle. Cette élévation spirituelle se fait à travers une âme pure car celle-ci est le moteur de la spiritualité. La purification de l’âme passe par le travail sur ce que l’on fait et ce que l’on pense afin d’élever ce que l’on est, à savoir des créatures du Divin dotées, chacune, chacun, d’une âme.

Apprendre, c’est se réconcilier

L’apprentissage est en soi une forme de réconciliation. En effet, apprendre c’est réconcilier quelque chose d’ancien avec quelque chose de nouveau, quelque chose de l’intérieur avec quelque chose de l’extérieur. C’est faire appel à une expérience passée pour comprendre une expérience nouvelle. Dieu nous a d’abord doté d’une raison avant de nous envoyer la révélation. Il aurait été inutile de recevoir la révélation si nous ne possédions pas les outils intellectuels pour la comprendre. L’apprentissage réconcilie le savoir déjà acquis à l’information nouvelle. En d’autres termes, comment, à la lumière de ce que je sais, puis-je approcher et comprendre ce que je ne sais pas encore. Le Ramadan, en tant que mois de la réconciliation est donc aussi le mois de l’apprentissage, de l’approfondissement, de la quête de vérité en toute humilité.

Savoir et croire

Le savoir, en tant que quête de vérité, n’est pas simplement un rapport de causalité. Ce n’est pas seulement une suite logique d’évènements rationnels. Il y a ce que l’on sait et ce que l’on sent, ce que l’on questionne et ce que l’on comprend. Ainsi on ne comprend pas forcément ce que l’on sait et on croit souvent savoir parce que l’on comprend. On ne peut donc réduire le savoir à la raison. Ce serait l’appauvrir. Par contre, il faut tout autant reconnaître l’apport de la raison et la réconcilier avec l’âme. Ces deux là ne doivent pas être opposées mais complices dans la quête de sens et l’approfondissement de la foi. Car l’âme, elle aussi, possède tant de vérités. « Le cœur a ses raisons que la raison reconnaîtra[1]» disait Tariq Ramadan dans un entretien avec Edgar Morin. Encore faut-il écouter son âme, l’entretenir et l’élever.

La Souffrance, l’Humilité et la Réconciliation

La réconciliation est souvent précédée par la souffrance. La souffrance, cette division, quand bien même douloureuse, n’est pas tragique. Elle est pédagogique. Elle éduque. C’est de cette souffrance débouchant sur un savoir que l’être acquiert une certaine humilité. Savoir et humilité sont nécessaires dans l’élévation de l’âme. Ainsi, par souci d’humilité, devrait-on différencier posséder une idée et adhérer à une idée. Si le savoir est une finalité, l’humilité est la nuance à cette finalité. L’humilité est le mode par lequel je sais. La souffrance menant à l’humilité est une étape nécessaire à l’apprentissage, donc une étape nécessaire à la réconciliation. Ainsi, durant ce mois de jeûne, la souffrance éprouvée par le corps et la discipline imposée à l’esprit sont tous deux des bienfaits nécessaires au rapprochement du cœur et à la purification de l’âme.

Vers la Paix

L’âme est essentielle sur le chemin qui mène à notre aspiration innée: la paix. Purifier son âme, c’est se réconcilier. Se réconcilier, c’est faire la paix. Dans ce chemin qui mène à la paix, il y a l’apprentissage de la purification de l’âme. Cette école qu’est le  la pratique du jeûne durant le mois de Ramadan est un des moyens permettant cette purification. Profitons de ce mois pour jeûner, pour partager, pour donner, pour pardonner, pour apprendre, et enfin, pour renaître. Faisons de ce mois une base solide pour l’année à venir et le prochain mois de Ramadan, où les éléments seront identiques et pourtant, différents. Tel est le chemin vers une paix dans l’absolue.

En ce mois béni, je souhaite donc à tous mes frères et sœurs en Islam, tous mes frères et sœurs en Humanité, tous ces ‘détenteurs d’âme’ de se rapprocher de la paix.

[1] “Au Péril des Idées”, Presses du Châtelet.

« La position prise dans le texte est celle de son auteur et pas forcément celle du site qui l’accueille et la publie »

1 COMMENTAIRE

  1. Salaamun wa rahmatullahi wa barakaatuhu,
    Frère Noumane,
    C’est une compilation -non exhaustives- de thèmes qui s’articulent autour du mois béni du ramadan, particulièrement la notion de réconciliation. Soyez-en remercié.
    Cependant, j’ai quelques petites remarques concernant la méthode générale de traiter le sujet :
    – il n’y a aucune argumentation se basant sur le Saint Coran ou la sunna, c’est un peu bizarre d’avoir volontairement omis ces références quand le sujet même de votre texte est une pratique religieuse qui a des fins (objectifs) religieuses
    – il y a souvent des constatations, ou des énonciations de faits, de vérités, sans aller plus loin dans le développement (établir les définitions d’abord, savoir de quoi on parle précisément, et questionner d’où viennent les faits énoncés, pourquoi de telles vérités, d’où cela vient ?), par exemple tout le paragraphe sur « l’âme, le corps et l’esprit », et celui sur « savoir et croire » sont diffus et confus. Est-ce avec l’âme que l’on « sent », que l’on « comprend » ? C’est difficile de parler de l’âme en ces termes. C’est tronquer les choses aussi que de présenter le savoir ainsi (profane, si j’ai bien compris -ce n’est pas le « ilm », du « fiqh » dont vous parlez). Par exemple associer la réconciliation, l’humilité et l’apprentissage (le savoir) à la souffrance n’est pas bien établi non plus. Pourquoi la souffrance serait-elle nécessaire à l’humilité, à l’apprentissage et à la réconciliation ?

    Enfin, je salue cependant l’effort considérable fourni pour tenter de relier ces thèmes entre eux, pour leur donner sens. L’approche globalisante est très marquante de cet essai, il faut la garder, sans négliger le sens du détail (définitions et argumentations).

    Et Dieu sait mieux !
    Que Dieu nous/vous guide.

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