La 3e rencontre culturelle de l’UAMO (Union des associations musulmanes de l’orléanais) s’est achevée samedi soir au parc des expositions d’Orléans. Cette manifestation qui mêle stands associatifs et conférences avait cette année pour thème la responsabilité déclinée dans l’éducation, la fraternité, la montée du radicalisme chez les jeunes, la construction de la citoyenneté et le vivre ensemble, la foi.
Invité vedette,Tariq Ramadan, professeur d’études islamistes contemporaines à l’université d’Oxford, déclaré haut et fort persona non grata quelques jours auparavant par trois sections orléanaises du parti socialiste, ces dernières demandant à la municipalité d’interdire la venue« d’un prêcheur d’un islam fondamentaliste, réactionnaire et intégriste dans la ville de Jean Zay, grand défenseur de la laïcité ».
Tariq Ramadan, est intervenu à deux reprises et ce malgré la controverse. La première lors d’une table ronde avec Michèle Sibony, vice-présidente de l’UJFP (Union juive française pour la paix) sur « Les influences des enjeux géopolitiques sur la construction de la citoyenneté » (1), la deuxième lors d’une conférence sur « La foi et la responsabilité, une exigence« . Pendant plus d’une heure devant une assemblée de plus de 600 personnes – des familles avec enfants mais aussi de nombreux jeunes adultes, filles et garçons – le professeur a expliqué sa conception de l’islam et de la foi. Parler de dieu, ce n’est pas dire la norme, ce qui est permis ou interdit, « c’est parler de cosmologie ». « S’inscire dans un univers qui a du sens ». Un discours d’ouverture et d’exigence vis à vis de soi qui a mis en avant 3 grands axes. « La création a donné la nature en cadeau, à vous la responsabilité de bien la gérer ». « Nous ne sommes pas les propriétaires du monde » (rappel des pratiques des Indiens d’Amérique, de l’hindouisme et du bouddhisme).« Dieu a créé cet univers et voulu la diversité … la diversité c’est l’ordre du monde, nous devons gérer la diversité, c’est la loi de la création ».
Invitant à trouver le juste milieu : « le plus difficile, ce n’est pas les extrêmes, les extrêmes, ça c’est facile, ce qui est difficile, c’est l’équilibre : savoir être soi sans nier autrui, savoir reconnaître autrui, sans se nier soi ». Enfin, dans un appel à mieux se connaître et « s’entre-connaitre », Tariq Ramadan a conclu sur la nécessité de l’engagement et le refus de tout racisme. » Soyez les acteurs du vivre ensemble, c’est ça l’engagement » …. « La citoyenneté ce n’est pas l’apolitisme, un bon musulman ce n’est pas celui qui se tait… Soyez positifs, soyez apaisés, ce que vous vivez n’est pas un échec ».
Au total, c’est un discours d’apaisement sur l’islam que tint Tariq Ramadan, on regrettera pourtant la couverture pour le moins discrète de ses propos dans les médias. Faire profil bas et laisser courir la rumeur, comme jadis, contre les juifs, couru la rumeur d’Orléans? D’une ampleur si folle qu’un certain Edgar Morin (le même qui dialogue aujourd’hui avec Tariq Ramadan) cru bon de venir sur place un été de 1969 pour en démêler les mécanismes (2)… Face à cette manifestation« ouverte à tous dans un esprit de fraternité et d’échange », le choix a prévalu d’une politique de l’évitement.
De quoi continuer à nourrir les peurs et attiser un feu qu’il serait pourtant prudent d’éteindre.
Brigitte Estrade
J’étais présent lors de votre conférence à Orléans, j’ai entendu un discours complètement responsable, exigeant et très positif.
Je vous reproche une seule chose, et ce, depuis que j’ai commencé à lire vos livres et vous suivre médiatiquement, c’est votre clarté. Vous êtes trop clair, et cela rend votre présence dans les médias indésirable, car, tout sera dit et compris.
Bon courage cher Ramadan, vous demeurerez cher Inchallah.