Proximité de l’Être

Sans doute ton cœur s’est-il ému, comme le mien, lorsqu’il a entendu les sermons nourris par l’exemple du Prophète (PBSL) et celui des compagnons intimement et spirituellement nourris par la force de «s’aimer en Dieu». Sans doute as-tu, comme moi, senti ton être vibrer à l’appel de cette fraternité et de cette solidarité qui devaient être les traits distinctifs de la «communauté des musulmanes et des musulmans». Sans doute l’as-tu dit, sans doute l’as-tu répété, sans doute l’as-tu rêvé… silencieusement, sincèrement, profondément.

Et puis certains matins, au cœur de ce même silence, de cette même sincérité, du tréfonds de ton être, tu as senti naître comme un malaise. Tant de discours, tant de promesses et d’idéalisme et, au fond de ton être, la réalité d’un autre quotidien… par quelle négligence, par quel oubli, par quelle perversion enfin la parole d’apaisement du Coran, le rappel si humain du Prophète (PBSL) sont-ils devenus les instruments des jugements les plus définitifs, des rejets les plus cruels et la justification de condamnations si aveugles? Il t’arrive parfois d’avoir cette curieuse impression de faire partie d’une communauté qui s’est transformée en un immense Tribunal des intimités et des faiblesses… Tu cherchais des sœurs, des frères ; tu trouves des juges… et en écho reviennent à ta mémoire les belles paroles sur l’amour dans la foi. Leurs mots… des mots…

Tu ne souhaiterais pourtant pas grand chose… simplement, très simplement, revenir à l’essentiel et rappeler à ceux qui t’entourent que Dieu pardonne plus qu’ils ne condamnent, que tu as besoin d’êtres humains qui t’accompagnent davantage que de discours qui sermonnent ; que l’amour dans la foi est une façon de vivre et non une «façon de parler», que tu vaux autant par tes qualités que par l’énergie silencieuse que tu déploies à réformer tes défauts. N’y a-t-il pas des matins où ton cœur, triste et lassé, aimerait dire tout cela?

Dire qu’il convient, n’est-ce pas, de «trouver soixante-dix excuses à son frère, à sa sœur»… Dire et répéter de ta voix la plus douce : « Ô mes serviteurs qui avez commis des excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu, Dieu pardonne tous les péchés […] » Parce que c’est de cela que tu veux vivre, parce que c’est cela qui apaise ton cœur. Loin des culpabilités. Le souvenir de Dieu. Lumière, Paix, Clémence… Ses noms.

Au creuset de cette spiritualité, tu peux forger ton espoir et, dans la proximité de l’Être qui est proche, retrouver la force, au-delà des hommes, de vivre avec les hommes… Peut-être pourras-tu alors, dans la solitude de ton cœur, sur le chemin que seul(e) tu empruntes vers le Très-Haut, murmurer affectueusement à ton frère, à ta sœur, que parfois le meilleur moyen de te parler est de se taire. Tu entendras. In shâ’ Allah.